Avec Ariel Pink’s haunted graffiti, on se situe dans la première catégorie, les Californiens affichant un réel penchant pour le loufoque, l’expérimental retenu mais omniprésent avec tout ce que cela sous-entend comme « collages » sonores et stylistiques. Dans un premier temps déroutant, fait d’une sorte de new-wave à la limite du sirupeux (L’estat, entre douceur chantée et élans plus déviants), mais vive et tubesque (Bright lit blue skies) succédant à un morceau indéfinissable, Hot body rub, qu’on pourrait rapprocher des oeuvres de Jessie Evans, doté d’une voix étrange, l’album poursuit ensuite dans cette veine et demande un effort d’assimilation, au bout duquel tout auditeur un tant soit peu perspicace trouve la récompense.
C’est ainsi qu’après les titres énoncés plus haut, s’impose Fright night, rythmé, à la fois sensuel et pervers, qui démontre l’adresse qu’a Ariel Pink à concevoir une new-wave « rénovée », à l’esprit aventurier, qui défricherait pour, au bout de ce travail de déconstruction, trouver sa cohérence et sa pertinence et s’imposer comme l’un des styles « nouveaux » les plus attrayants qui soient. Les voix légères et imbriquées (Round and round, entre autres) et les structures inédites surprennent et font mouche, l’apparition en certaines occasions d’un saxophone renforçant le côté 80’s de Before today. A cela s’ajoutent des morceaux d’obédience disco (Beverly kills), rythmés, funky, dansants à souhait, animés par des synthés virevoltants…et les cris de Tarzan, c’est dire dans quel état d’esprit, dans quelle folie créatrice se trouve notre Ariel Pink, et tranchants comme Butthouse blondies et ses guitares offensives. Puis c’est Little wig lui aussi mordant, mais porteur de breaks innatendus, comme la plupart des autres plages. Sinueux, ce titre emprunte plusieurs voix, et plusieurs voies, pour n’en choisir aucune, et se veut en cela parfaitement représentatif de l’album: indomptable et pourtant de haute volée, jusque dans la délicatesse fatale de Can’t hear my eyes, joyau pop 80’s presque accessible.
Suite à cela, Reminiscenes, instru évoquant ceux des Beastie Boys, à la croisée de tout, sans queue ni tête mais passionnant, puis un Menopause man à dominante funk, aux relents Madchester discrets, apportent leur pierre -branlante- à cet édifice génialement bancal, auquel Revolution’s a lie, énergique, taillé dans une « punk-wave » enthousiasmante, met la touche finale avec brio.
Excellent album donc, bigarré, haut en couleurs, singulier surtout, se situant sans contestation possible parmi les travaux les plus intéressants de l’année en cours.