Emmanuelle de Hericourt a bourlingué, depuis le début des années 2000, aux Etats-Unis notamment, où elle s’est exilée pour revenir à Paris en 2003. Elle compose et sort dans la discrétion, mais avec une certaine productivité, en collaborant ou de façon personnelle, des petits trésors electro, dont le dernier en date, ce Predature fraichement sorti, livre une grosse dizaine de chansons originales et abouties.
Si elle suit une trame souvent identique, EDH impose son univers sombre et léger, sobre mais habilement orné, assez attractif au final, bien qu’on puisse déplorer l’absence de réels moments plus tranchants, comme le laisse présager l’intro et les sons rock, acides, de Neighbourhood. On se prend néanmoins à s’enticher de compos telles que Ramble, songeuse et obsédante, puis Glovitch, remuant et doté d’une voix distante et « light ». La plupart sont de bonne tenue, et des basses rondelettes (Someone, truffé de sons décisifs) donnent un groove imparable à l’ensemble. On appréciera d’ailleurs ce morceau pour son envol rythmique et sa folie sonore, de même que le côté cold, allié à la rêverie émanant de la voix, de Medium waves.
L’amorce est donc probante, et le reste suivra, de Stephanovitch, aux synthés inventifs, à l’excellente conclusion qu’est The doorway, avec sa basse cold enthousiasmante, EDH affichant à nouveau une inspiration constante dans le choix des motifs « décoratifs », le tout sur un rythme vif.
Les penchants à l’errance mentale émanant du chant et du contenu musical constituent un atout de taille pour Emmanuelle, qui en use sur Aligula et bon nombre de titres de Predature, et nous montre qu’on peut séduire, et parvenir à une réalisation fiable, sans en rajouter. Et quand elle laisse libre cours à une trame plus excentrique (Three days), la qualité est de mise, ceci sans se départir de cette tendance récurrente à la rêverie.
L’esprit rock d’ Anymore, tout au moins sur son intro, massif et doté de percus bienvenues, puis saccadé et relevé par des scratches encore une fois bien investis, apporte sa contribution à Predature, à l’instar de l’alerte Dead dog, et les gimmicks sonores de la demoiselle produisent un effet psyché étonnant tout au long de l’album.
C’est ce qui explique l’attachement porté à ce disque qui nous prend très vite dans ses filets, d’autant qu’arrive l’ouvertement rock Relativities, rapide, mordant, le chant donnant cette fois l’impression non plus d’une rêverie, mais d’un réveil…et d’un éveil à une énergie débridée dont la survenue rompt avec à-propos la retenue des titres précédents.
Avec Nothing to kill et son retour à des vélléités plus « sucrées », et la conclusion amenée par The doorway décrit plus haut, l’opus en question affiche d’indéniables qualités, se situant de surcroît au carrefour de plusieurs tendances dont la synthèse est ici effectuée sans écarts. Le seul « regret » tenant dans le nombre à mon goût trop peu élevé de titres plus enlevés, plus « affolés ».