C’est d’ailleurs le premier, imparable et honorant, dans un esprit actuel et avec une superbe inspiration, les early 80’s, qui inaugure ce EP de haute volée, avec en son refrain et dans ses sonorités une touche à la Talking Heads hautement appréciable, doublée d’un groove dément et d’un allant non-moins notoire, l’acidité sonique « de fond » venant parachever le tout.
L’entrée en matière est donc fulgurante pour les « collègues de promo » de This is Pop, originaire de la même contrée, et la légèreté pop gentiment cold de Lover song, superbe second morceau, ne leur apporte que plus de crédit encore. A la fois enlevée et émotionnelle, forte d’un refrain une fois encore mémorable et fédérateur, d’un enrobage sonore de choix, déchiré par de brusques excès sonores (superbe initiative), cette composition étoffe le registre des Tourangeaux et fait qu’au bout de deux titres, donc, on comprend déjà que passé la démo inaugurale et de choix, les Finkielkrauts ont placé la barre très haut, à une hauteur surprenante pour un si jeune groupe.
Seul le talent permet cela, et Colonizer hat enfonce le clou d’un univers à la fois hautain et distingué, froid et chaud comme la braise du point de vue de l’instrumentation mise en place. Alerte, étayé par un chant racé et des guitares dures, la rythmique, solide, charpentant parfaitement le tout, il place définitivement la formation concernée dans la catégorie des groupes confirmés, aux influences d’ores et déjà surpassées et sublimées, et nous donne la certitude qu’aucun des cinq morceaux présentés ici n’offrira la moindre prise à la critique.
Cela se confirme bien évidemment sur Writing a song, David, Julien, Clem, Antoine et Maxime y faisant preuve, si besoin était, d’une cohésion époustouflante, le tout en alliant climats cold, pointes noisy, sensibilité pop et breaks judicieux avec la maitrise des plus grands. On pense à Cristal Palace, autre révélation de mouvance similaire dans l’esprit, aux morceaux aussi aboutis, et les Finkielkrauts réussissent la prouesse de signer une pelletée de chansons aussi marquantes que celles de ses sources d’influence, entre post-punk, noisy-pop et cold-wave mesurée. A la croisée, donc, des genres et des époques, quelque part entre 1977 et le moment même où j’écris ces lignes, en passant par des 90’s dont ils ont repris à leur compte, et avec brio, l’urgence noisy (Cockscuker no blues, avec ses déflagrations noisy à la Pixies/Garageland, en étant un superbe exemple). Urgence qui caractérise Technocrat, ultime tube post-punk de cette fringante série, à l’intro de basse exaltante. Incoercible, fonceur et sans barrières, insoumis, mordant et pourtant très juste dans son dosage entre mélodies prises dans le flux instrumental et force de frappe émanant de ces mêmes instruments, ce dernier met fin avec maestria à Distance, oeuvre majeure, dont on attend désormais la suite (un album?) avec impatience. Et on réécoute ce disque à l’envie avec en tête, à la fin de chaque audition, les paroles du refrain obsédant de Technocrat, et l’irrépréssible envie de le faire tourner encore et encore dans nos platines, qui auront rarement été à pareille fête.
Superbe sortie donc, faite de morceaux tubesques et sans réel équivalent si ce n’est chez les autres pépites tourangelles, actuelles ou d’origine, telles que This is Pop ou Johnny Boy, ou encore Boogers.