Artiste méconnue, Serafina Steer a pourtant partagé la scène avec Patrick Wolf, Polar Bear ou Anthony and the Johnsons, et en est, avec ce Change is good change is good, à son second album. Elle y use d’une instrumentation à base de batterie, violon et…harpe, et autres synthés et drummachines. L’Anglaise y adjoint sa superbe voix, et signe douze titres graciles, souvent posés, qui dès le sombre et brillant Shut up shop, envoûtent de façon immédiate. Serafina dresse de superbes petits écrins sonores, teintés d’une électro discrète, et la magie opère sans qu’on s’ennuie une seule seconde, la demoiselle servant ensuite quelques morceaux plus enjoués, plus rythmés, de même valeur.
Le début de l’opus est donc assez tranquille, étincelant, entre le titre inaugural et ce Day glo dénudé, avant GSOH et son tempo gentiment appuyé, toujours sous couvert d’une vêture sonore de choix.
Sur The valley, le mélange entre l’amosphère obscure et des voix plus enjouées charme l’oreille, qui se voit ensuite gâtée de nouveau le temps d’un Motion pictures sobre et enchanteur comme l’est cette première partie de l’opus, la sixième plage, Drinking while driving (after R.Carver poem) exhalant ce même climat un peu en trompe l’oeil dans le sens où la beauté émanant de la voix et des instruments cache une trame moins sereine.
La suite, loin de tomber à plat, dévoile un How to haunt a house party mid-tempo orné de séquences électro obsédantes, allant de pair avec l’organe vocal de Serafina, puis un Margoton au chant…en Français, narrant une histoire loufoque et captivante, sur un rythme là encore vivace et animé par des claviers guillerets. Il n’y a donc aucun moment de faiblesse à relever et la demoiselle met même à profit cette fin d’album pour imposer sa marque de fabrique, après Port Isaac et ses instruments sages, jouant comme souvent sur le disque dans la cohérence la plus totale, chacun s’octroyant une petite partie de l’espace sonore sans en rajouter, en y mettant juste ce qu’il faut pour accrocher l’oreille de façon durable et définitive. C’est le cas, donc, sur The sisters of proportion, au contenu identique, puis Half robot, un peu plus étoffé, apporte une jolie contribution à cet album élégant, légèrement assombri, qui par ce qu’il dégage semble résumer l’existence de sa créatrice, au sein d’un environnement, comme le dit sa petite bio, difficile mais plein de grace et de beauté. Trois notions qui « décorent » Ulular, dernier morceau du disque, et ledit disque dans son intégralité, au sujet duquel on n’exprime finalement qu’un regret. On aurait aimé, en effet, qu’il exprime de façon plus prononcée le côté troublé de Serafina Steer, et vienne par là-même souiller de façon moins épisodique, plus régulière, la splendeur qui l’anime. Ce qui ne l’empêche nullement, finalement, de constituer une belle surprise et une découverte à retenir.