On se souvient que le trio montpellierain avait frappé un grand coup avec ce premier album éponyme, qu’on qualifiera de trans-noise, énorme et entièrement novateur. A l’heure du second effort, forcément attendu, le challenge est de taille et consiste à faire aussi bien sans tomber dans la redite vis-à-vis d’un style qui, s’il se veut neuf et inédit, gagnerait à évoluer, créditant d’autant plus ses géniaux géniteurs.
Eh bien ce pari, MARVIN le relève ici avec brio et complète sa palette, l’affine plutôt, tout en restant dans ce domaine noise doté d’une force de frappe, et de séduction, conséquentes. Légèrement plus mélodique, moins dense, ce disque fait se succéder neuf morceaux variés, au panel stylistique d’importance et parfaitement synthétisé.
En outre, un chant « normal » apparait, et dès Roquedur et ses riffs métal énormes, il dote l’entrée en matière des Héraultais d’un surplus d’intérêt. Direct, à la fois noise, post-hardcore et métal, donc, de par ces accords puissants, il réitère la puissance du premier jet en l’exprimant de façon moins frontale et tout aussi percutante.
Passé cette amorce idéale, Au 12 et ses synthés bavards, alliés à cette guitare constamment attractive, taillent dans la noise la plus brute qui soit un morceau de choix, bien breaké, justement, par la six-cordes, tenu à bout de bras par une batterie éléphantesque, au moins aussi accompli que le premier. On se dit alors que sur cette nouvelle livraison, Marvin peut atteindre les sommets. On le pressent, bien qu’on n’en soie qu’à deux morceaux, et Dirty tapping, aux voix robotisées qu’on aime tant, porteur d’une « légèreté » nouvelle sans se déparer de cette puissance bienvenue, confirme brillamment ce ressenti.
Réfléchie et instinctive, superbement cosmique en certains endroits, la noise de Marvin revêt des apparats divers et jamais pris en défaut. Et sur Reste bien tranquille, le groupe démontre son adresse dans un dosage plus juste, plus équilibré et moins directement puissant, tout en nous enivrant de ses sonorités dont il semble détenir le secret.
C’est ensuite Conan le Bästard (allusion forcément louable à qui vous savez…) qui impose des riffs parfaits et une trame vive et remuante, en usant de motifs, et d’ambiances, parfaitement complémentaires.
Arrive après cela un Good radiations aussi athlétique bien que moins fonceur, qui met en valeur, à l’instar de beaucoup d’autres compositions, la dualité guitares-synthés, et remet en scène cette voix caractéristique du trio. Puis Moustache 34, muni lui aussi de sons démentiels, bruts, garage, et dans le même temps mélodiquement déviants, assied définitivement Emilie, Fred et Greg dans leur statut de groupe culte, car réservé à une caste particulière et avisée, et incontournable. Ce en quoi Fear, explosif et incoercible, boosté par cette symbiose parfaite entre guitare de feu, claviers inventifs et batterie tout-terrain, l’imite avec pour effet de mettre définitivement KO un auditeur déjà assuré de ne pas connaitre de sitôt l’équivalent, en qualité comme dans le style, à cet album inimitable et encore moins égalable.
Marvin ayant ensuite la super idée de reprendre, de façon personnelle et imparable, noisy, mélodique et endiablée quoique porteuse de mélodies marquantes sur le plan vocal, le Here come the warm jets de Brian Eno, ce Hangover the top s’impose tout naturellement comme l’album « noise » (l’appelation ne pouvant toutefois suffire à décrire et définir l’univers de la formation) de cette année 2010, au carrefour de genres dont les protégés de Miguel Constantino réalisent ici un amalgame éblouissant.