Perturbé et élégant, voilà comment pourrait se définir cet album de Picastro, groupe canadien hébergé par Monotreme, label aux formations non-conventionnelles et proposant des réalisations très souvent abouties.
L’instrumentation se pare ici d’outils inédits, dont des cuivres très présents, et livre une trame indéfinissable, qui subjugue autant que son côté expérimentalpeut inciter au renoncement. Twilight et A dune of doom, les deux premiers titres, reflètent cette impression, puis Pig & sucker, plus classique, constitué d’une voix féminine attractive sur fond acoustique sombre, permet d’amener un certain répit dans l’apreté des morceaux.
Split head et son violon tristounet confirment cette accessibilité non-dénuée d’étrangeté, la vêture instrumentale, superbe, n’étant en effet jamais complètement « normale ». Ici par exemple, elle se veut sombre, grinçante, lancinante et dégage un sentiment de trouble, d’inquiétude. Les ressentis s’entrechoquent et accouchent de morceaux dérangés, classieux comme I know my time now et Neva, aussi pluvieux que lumineux, ou Suttee et sa « chorale » déglinguée allant de pair avec des percussions mécaniques et bizarroïdes. Ce dernier terme pourrait d’ailleurs décrire de façon juste le contenu de l’opus dont je vous parle, à ceci près que Picastro associe à ce côté tordu une étrange beauté, décisive, et en fait la constituante principale d’un univers captivant, représenté par A neck in the desert, morceau piano-voix-violon merveilleux, tenant autant de la musique classique que d’un registre world, ou The stiff, dernier effort marquant , aux motifs inventifs et inédits, qui met fin de belle manière à ce Become Secret dont on espère, compte tenu de ce qu’il dévoile, qu’il de viendra tout sauf secret.
Magnifique album donc, du jamais entendu à découvrir toute affaire cessante.