Par Amenina, Mickymaxxi et Joseffeen
Emily Loizeau:
Pour le premier album, j’étais une pianiste qui s’est mise à chanter et
il y avait un tandem piano/voix très fort qui est encore là mais qui
est peut-être un peu plus sur le côté qu’au centre. Sur ce deuxième
disque, il y a autre chose qui se passe. J’ai fait deux ans de tournée
avec mes deux musiciens et j’ai fait ce disque avec eux. J’ai voulu me
libérer un peu du piano donc certaines chansons de cet album ont été
écrites sans piano. Pour cet album, j’ai préféré me baser sur un duo
rythmique/voix. C’est un disque qui est brut, très ludique et qui a
presque un rapport animal à la chanson. C’est un disque qu’on peut
presque crier en tapant sur une table.
MuzzArt: L’ambiance est peut-être plus joyeuse…
Emily Loizeau: Oui, au moment de l’écriture de L’Autre bout du monde
(Fargo, 2006), je venais de perdre mon père. Ce nouveau disque répond
au précédent en constatant que le deuil est fait, que ses douleurs, il
faut les assumer et c’est un peu une manière de crier: « Je suis
vivante, on est vivant! ». Pour moi, dans la musique, il y a cette idée
de jouer ensemble pour célébrer quelque chose. Il y a aussi l’envie de
partager avec le public et de les faire voyager.
Emily Loizeau sur scène à la Rock School Barbey le 30 avril 2009
MuzzArt: D’où aussi les nombreuses collaborations sur cet album…
Emily Loizeau: Oui et je ne l’avais pas du tout prémédité. Je ne me suis pas arrêtée de tourner en me disant que j’allais faire un album collectif. Je suis allée me réfugier chez moi en Ardèche où je suis restée toute seule un certain temps. J’avais envie de me retrouver, de m’isoler et, en composant, je me suis rendue compte que cette musique-là appelait un son collectif. J’ai fait les maquettes toute seule pour la voix et les instruments mais j’ai voulu que ce soit enregistré dans des conditions de live avec d’autres gens et pas des superpositions de pistes. J’ai grandi avec une famille dans le théâtre et un oncle qui revenait du Canada avec ses chansons et sur lesquelles on chantait. Ce truc de partage est complémentaire à mon parcours classique dans le piano, très solitaire. Ce côté forain et léger m’a toujours attirée. C’est un truc que j’avais envie de retrouver.
MuzzArt: On a vu Moriarty il y a quelques mois et Stéphane (ndlr: bassiste du groupe) nous a dit qu’ils s’étaient bien amusés lors de l’enregistrement des titres avec toi. Comment s’est passée votre rencontre?
Emily Loizeau: On s’est croisé 2 ou 3 fois sur la route puis j’ai eu leur album et leur musique m’a vraiment fait penser à la musique de mon oncle. C’était très étrange de retrouver ça et c’est un groupe qui m’a beaucoup touchée. Et puis, c’est un groupe génial tout simplement!
Ensuite, comme j’avais envie que ce disque sonne comme tout un village qui chante, je suis aussi allée chercher des gens comme David Herman Dune et Danyel Waro dont je sentais que l’esprit était proche de ça.
MuzzArt: Il y a aussi un duo avec Thomas Fersen sur la chanson « The princess and the Toad »…
Emily Loizeau: Oui, je me suis amusée à faire rimer le français et l’anglais, c’est un petit défi qui m’a fait rire. Je me suis essayée beaucoup à faire des versions française et anglaise de certaines chansons. Ça a commencé avec un label américain qui voulait sortir L’Autre bout du monde là-bas et m’avait demandé une version anglaise de « Jalouse » et « L’autre bout du monde » et j’ai commencé par « Jalouse », ça m’a amusée de le faire. Je l’ai donc fait aussi sur certaines chansons du nouvel album. Finalement l’anglais m’a inspirée pour écrire des chansons comme « Dis-moi que tu ne pleures pas » dans un français presque cajun, un peu créole. C’est d’ailleurs ça qui m’a fait penser à Danyel Waro. Mon français devenait aussi simple que le français qu’on tord, qu’on emmêle, qu’on expatrie et qu’on impose à des gens qui le tordent un peu: le français expatrié, quoi. Ça donne une langue riche.
MuzzArt: Est-ce que vous avez prévu de faire des dates avec tous les invités du disque?
Emily Loizeau: On l’a fait quasiment, il n’y avait pas Waro. On l’a fait à l’Alhambra à Paris sur trois dates. On a fait une variation de ça avec d’autres gens à Bourges, des artistes de la programmation du festival. Maintenant, on tourne à 5 mais c’est vrai que quand il y a les Moriarty sur scène avec nous, on s’éclate. A cinq, il se passe autre chose, progressivement on construit le son d’un groupe. Et puis, on a écrit les arrangements à trois, enfin, à quatre avec en plus une amie Jocelyn West qui a écrit le violon et fait des choeurs. Du coup, comme c’était mes musiciens de live, quand on s’est retrouvé en répet’, c’était assez évident.
MuzzArt: Récemment tu as également fait la BO du film King Guillaume, tu peux nous en parler?
Emily Loizeau: C’était étonnant, très enrichissant et très éprouvant. La composition s’est faite en même temps que l’écriture de mon album. C’était la première fois que j’écrivais une BO. J’ai bien eu le trac mais ça a été génial d’une part parce que Pef est un réalisateur et une personne sensible, passionné de musique qui m’a fait énormément confiance et d’autre part parce que ses demandes à lui m’ont beaucoup inspirée pour l’album. Ça a été un vase communiquant. « Fais battre ton tambour » a été initialement écrite pour lui pour qu’elle soit chantée par un choeur de gospel dans une église et en l’écrivant, je me suis rendue compte que c’était une chanson importante pour moi mais je ne l’aurais pas écrite si je n’avais pas rencontré Pef un jour. La vie est bien faite! (rires) C’était une très très belle aventure, une aventure magique.
MuzzArt Quizz:
MuzzArt: Quel est ton Beatles préféré?
Emily Loizeau: Tous les jours, ça change. Je crois quand même que c’est Lennon.
MuzzArt: Selon toi, quel est le meilleur endroit pour écouter de la musique? Dans un bar, un studio, à la maison…?
Emily Loizeau: Le train!
MuzzArt: Et le meilleur endroit pour jouer de la musique?
Emily Loizeau: Dans ma maison.
MuzzArt: Y a-t-il une chanson que tu aimerais reprendre?
Emily Loizeau: Oui, une chanson de Stevie Wonder qui s’appelle « He’s Misstra Know-it-all«
La première partie du concert était assurée par Kyrie Kristmanson