La charmante et talentueuse Jen h.ka prouve avec cet album qu’elle a parfaitement bien assimilé, et intégré, ses influences. On a en effet l’impression d’entendre un sublime patchwork mêlant celles-ci pour en faire une musique très personnelle, allant de l’intimiste au colérique en passant par des compositions mixant les deux.
Après deux titres d’ouverture très rock nous envoyant en plein Dorset (territoire de PJ Harvey), par conséquent très convaincants, « Please » chanté en français lorgne sur le trip-hop et fait la nique à Portishead, Jen montrant des capacités vocales et d’écriture hors-normes, et dotant cette compo trip-hop de guitares nerveuses venant troubler magiquement cette atmosphère plutôt planante au départ.
Sur « Overjoyed » (au titre prédestiné et visant l’auditeur potentiel ?? Ca ne m’étonnerait qu’à moitié, vu la qualité des titres offerts ici…), elle utilise l’électronique avec brio et la magnifie avec son organe vocal (aidée en cela par son collègue Sildd dont je vous recommande également chaudement l’album), puis renoue avec une certaine pêche rock sur « Oneliness ».Rien que sur ces cinq premiers titres, on comprend que la demoiselle a placé la barre très haut et justifie amplement la petite auto-description visible sur son site, extrêmement intéressante et qui montre à quel niveau chaque groupe cité a pu influencer sa musique et sa personnalité.
Comme si cela ne suffisait pas, elle confirme avec un « Back » mid-tempo et assez rageur ses capacités et l’aptitude de ses musiciens à bâtir une trame sonore de nature à accompagner et mettre en valeur ses textes et sa voix. Cette voix aussi convaincante en français, j’en veux pour preuve le très beau « Tu meurs » qui s’ensuit, que dans la langue de Shakespeare, « Ayrton » étant un peu le pendant anglophone de « Tu meurs » (même si l’atmosphère qu’il impose est plus orageuse, plus menaçante). « Listen » fait ensuite monter la tension d’un cran supplémentaire, de même que « Life is », achevant de faire de ce disque une œuvre majeure, intense, émotionnelle et variée. On en est alors au dixième titre sur quatorze au total (eh oui, Jen sait allier la qualitatif et la quantitatif, évitant le remplissage nuisible à la qualité et dans lequel tombent trop d’artistes), et les quatre qui suivent et concluent cet album sont de même qualité. Charmeurs sur « Maëva’s song », à la fois sensuels et rageurs sur « Gentle sleep », pour finalement conclure de façon faussement apaisée sur « Disparaître » et « Peau morte », ce dernier titre nous réservant une fin très rock sur laquelle la colère de Jen fait merveille et laisse l’auditeur pantois, à la fois étonné et émerveillé par le talent de ce groupe auquel la reconnaissance semble être un dû. Excellent album donc, et la preuve qu’il n’est pas forcément utile d’aller chercher des talents hors de notre territoire, quand on a sous la main des artistes de cette trempe. A découvrir absolument.
PS : A noter qu’à l’heure où j’écris ces lignes, trois chansons (Back, Life is et Gentle Sleep) ont été retirées de l’album pour être proposées ultérieurement. Et surtout, Jen, pour des raisons qui lui font largement honneur, propose cet album en téléchargement gratuit sur son site. Profitez-en, vous en priver serait incompréhensible !