Victor Crespi, puisque c’est de lui qu’il s’agit lorsqu’on évoque Ladybird, ce groupe à géométrie variable selon les endroits où se produit cet artiste (entre autres, Chili, France et Angleterre), écrit et compose de superbes petits chansons folk, nettement influencées par la vague ayant vu l’avènement de groupes comme Dinosaur Jr ou Sebadoh ou encore, dans un registre différent sans être réellement éloigné (plus pop, dirons-nous), Teenage Fan Club.
Ses compos, entre folk et lo-fi doucereux, réveillent en nous la saveur de cette époque prolifique et magique, pendant laquelle une multitude de groupes parvenaient, à partir de rien si ce n’est leur envie de jouer et leur passion de la musique, à créer des choses fabuleuses, uniques et captivantes. De sa voix douce, presque timide (on l’imagine aisément chanter en se regardant les chaussures, façon shoegaze, courant auquel il n’est d’ailleurs certainement pas insensible, loin s’en faut), Victor charme et accroche aisément, aidé en cela par une trame sonore dépouillé, aussi simple qu’enjôleuse. « In a sky made out of gold » qui ouvre ce EP illustre bien mes propos, d’autant plus que Victor se voit appuyé, en l’occurrence, par une voix féminine délicieuse et sincère, à l’image de la sienne. On pense à un Sebadoh assez ouvertement folk, qui aurait délaissé son côté lo-fi et laissé la part belle à l’acoustique (pour situer, Victor reprend de cette façon le fabuleux « Freakscene » de Dinosaur Jr lors de ses concerts…), et on se prend au jeu sans plus attendre, bercé et enchanté par ces vocaux aussi irrésistibles que timorés (les deux allant ici de pair) et le versant à la fois chaleureux et désabusé des chansons proposées ici. « Seagulls » qui suit, lui aussi sobre et réduit à l’essentiel, produit bien évidemment le même effet et se voit de plus doté d’instruments moins conventionnels qui apportent un plus à ce titre déja extrêmement convaincant. Lèger et reposant sur un rythme vif, ce morceau s’avère de surcroît différent du précédent tout en appartenant au même style. Arrive ensuite « Home in the sky », délicat et lui aussi très sobre, sans excès, aussi addictif que ce qui précède. Puis avec « That kind of fool », on s’aventure en terrain presque noisy, le folk du sieur Crespi se faisant ici superbement doux-amer, mais tout en retenue, sans jamais véritablement s’emporter ; grande réussite de plus ! Et pour conclure, on a droit à une seconde version de « In a sky made out of gold », plus électrique que la première et qui rappelle immanquablement les groupes cités en début d’article, de même que les géniaux Guided By voices. Il y a d’ailleurs du Robert Pollard, du Lou Barlow, allez, allons-y car c’est aussi vrai, du Jay Mascis dans la capacité qu’a Victor Crespi à composer dans un registre certes bien défini, mais à l’intérieur duquel il est capable d’offrir une certaine diversité. Le titre s’achève d’ailleurs sur une poussé rock bienvenue, magiquement brouillonne, à la manière des excellentissimes Pavement. Excellentissimes, comme ce EP plus que prometteur et dont on regrette qu’il ne contienne pas plus de titres. A découvrir impérativement.